Deux  heures. Allongée, Adela n’arrive pas à dormir. La fenêtre ouverte, elle regarde les étoiles, essaye de les compter jusqu’à sentir ses paupières tomber. Et puis elle entend sa sœur pouffer de l’autre côté du mur, sans doute en train de rire au téléphone avec sa meilleure amie, ou avec un des nombreux mecs qui la veulent dans son lit. Ad, elle lève les yeux au ciel. Elle aimerait aimer sa sœur, mais elle n’y arrive pas. Au contraire, plus elle la voit, plus elle a l’impression de la haïr. Trop populaire, trop belle, trop sociable .. trop tout. Ses parents c’est pareil, elle les déteste. Ils ne sont jamais là, toujours en voyage d’affaire, toujours trop occupé à s’occuper d’autre chose que de leurs filles. Et puis finalement quand ils sont là, c’est encore pire ; des disputes à n’en plus finir. Elle se dit qu’ils divorceront un jour, forcément, parce que y’a pas d’amour entre eux y’a rien, rien du tout. Du coup Adela elle n’y croit pas à tout ça, ce qu’on raconte dans les livres et les comédies romantiques, le grand amour qui frappe à la porte comme le plus beau des hasards, elle se dit que c’est une belle connerie. C’est pas pour autant qu’elle évite les mecs, au contraire, c’est avec eux qu’elle est le plus souvent fourrée. Elle les envoie balader aussi, parfois. Elle aime bien ceux qui sont directs, qui lui disent qu’elle est canon, qu’elle leur donne envie d’un tas de choses. Les romantiques par contre, elle les évite comme la peste encore une fois parce qu’elle ne croit pas à tout ça. Elle n’a pas envie de finir comme ses parents, à se disputer à la moindre occasion, à se détester plutôt que s’aimer.
Puis elle soupire. C’est trop de penser à tout ça. Elle veut juste oublier, dormir. Arrêter de pleurer pour rien aussi, même si personne ne le sait parce que c’est toujours en secret. Comme sa sœur en fait. Elles se ressemblent tellement finalement. Si elles réussissaient à s’entendre, peut être que tout pourrait être plus simple. Elle soupire à nouveau. Demain contrôle d’histoire. Elle n’a rien appris mais elle a tout en tête. C’est un des trucs que les autres comprennent pas chez elle ; personne la voit jamais bosser et pourtant ses notes sont souvent bien meilleurs que les leurs. Elle ne comprend pas non plus. Mais fallait bien qu’elle soit bonne en quelque chose, de toute façon. C’est simplement sa mémoire qui est très bonne, elle se rappelle de chaque détail, chaque signe, chaque parole. Pourtant y’a parfois des trucs qu’elle aimerait effacer, arrêter de  garder en mémoire. Et puis elle repense à ce prof trop âgé pour elle, cette attirance interdite. Elle se rappelle de cette soirée trop arrosée dans un bar où, sans savoir qu’il allait être le nouveau prof de Tree Hill à la rentrée, ils succombèrent à leur désir mutuel.  Depuis, au lycée, il l’évite totalement pendant qu’elle le cherche. Elle sait qu’elle l’attire, elle le voit dans son regard dès qu’elle s’approche un peu trop. Elle a envie qu’il cède ; il se retient à cause de sa raison qui lui envoie des signaux de dangers.. en couchant avec l’une de ses élèves, il pourrait avoir de sérieux ennuis. Mais elle, elle s’en fou pas mal des problèmes qu’il pourrait avoir. Tout ce qu’elle sait, c’est qu’elle a envie de lui, encore. Et elle s’endort sur ses pensées, en rêvant d’un lendemain moins long que le précédent.
© _Viviie.